La raison d'être de la « Tech For Good », la vraie, n'est-elle pas d’allier les nouvelles technologies et l’intérêt général ? Loin des mastodontes et de leurs levées de fonds à plusieurs millions d’euros, des initiatives plus discrètes de l’économie du partage se revendiquent vertueuses. Ces applis gratuites innovent pour donner envie aux citoyens d’être davantage solidaires et engagés. Découvrez la sélection de Marie Vabre.
- Entourage, « le réseau de ceux qui n’ont pas de réseau »
Et si nos téléphones portables nous reliaient aux personnes les plus isolées… Cette appli connecte voisins ou citadins entre eux pour leur permettre de venir en aide aux SDF de leur quartier, près de la maison ou du travail. « Le plus dur pour les personnes à la rue est d’avoir la sensation d’être invisibles, explique Claire Duizabo, membre de l’équipe d’Entourage. On essaye d’inciter tout un chacun à parler à la personne sans-abri devant laquelle il passe peut-être tous les jours». Une fois le contact établi, on identifie son besoin et on propose une action au voisinage, comme récolter des couvertures ou des produits d’hygiène, par exemple. Un petit guide sous forme de vidéos pédagogiques, intitulé « Simple comme bonjour ! » accompagne les riverains pour sauter le pas. La version Entourage Pro facilite le travail en équipe des associations sur le terrain. Pratique pour informer le public d’une maraude ou d’un événement de solidarité. Le guide officiel « Solidarité à Paris » a été numérisé, permettant de retrouver tous les lieux d’accueil, les dispositifs d’aide alimentaire, etc. Téléchargeable dans toute la France, l’appli qui compte plus de 40 000 membres, a fédéré plus de 3000 actions solidaires à ce jour. La communauté est très active à Paris, Lyon, Grenoble et Lille.
- Linkee, moins de gaspillage, plus de partage
Simple comme un trajet maison – commerçant ! Cette appli propose de géolocaliser des invendus alimentaires autour de soi, d’aller les récupérer et de les apporter à l’association partenaire la plus proche, comme Les Restos du cœur, le Secours populaire, Emmaüs ou le Centre d'action sociale de la Ville de Paris (CASVP). « Cela correspond à une attente des Parisiens actifs souhaitant agir, sans disposer de beaucoup de temps. Un “link“ peut se faire à pieds ou à vélo et ne dure pas plus de 30 minutes au total», explique Julien Meimon, le fondateur. Des partenariats ont été noués avec des supermarchés, des restaurants, y compris de grands chefs, des hôtels, des traiteurs ou des acteurs de la restauration collective. Les structures sociales n’avaient pas forcément les solutions logistiques pour récolter ces denrées de bonne qualité.Désormais, ce sont près de 1000 repas par jour qui sont redistribués, un moyen de lutter à la fois contre la précarité et le gaspillage alimentaire. C’est cette économie du partage plus inclusive que Julien Meimon défend dans son livre, Déclics solidaires. Une campagne de financement participatif est en cours sur la plateforme Helloasso. L’appli sera bientôt disponible dans d’autres villes.
- Schmilblick, le quiz solidaire
S’amuser tout en aidant de bonnes causes, c’est la promesse de cette appli. En inventant le Schmilblick dans les années 50, un invraisemblable objet imaginaire ne servant à rien et à tout, l’humoriste Pierre Dac n’avait sûrement pas imaginer la suite : une émission de télévision du même nom présentée par Guy Lux, une parodie de Coluche, une entrée au dictionnaire et une renaissance via le numérique ! Pour faire avancer le Schmilblick, Benjamin Athuil, jeune diplômé de l’ESSEC a eu l’idée de reprendre les règles du jeu télévisé : deviner un objet dont l’image est tronquée, grâce à des indices (animaux, villes, légumes, sports, films, séries, etc.). « Les jeux vidéos peuvent participer à une société meilleure. Des jeux mobiles qui financent des associations d'intérêt général, c'est le principe des Care-Game© », revendique Benjamin Athuil, cofondateur de la startup du même nom. A terme, il a pour ambition de créer un store alternatif, en dehors des systèmes App Store et Google Play Store qui prélèvent 30% de commissions aux développeurs d’applis. Cette nouvelle interface de téléchargement ne percevrait que 10%, ce qui permettrait aux acteurs de la solidarité de récolter davantage de dons. « On veut montrer aux joueurs qu’en étant champion de jeu, on peut être héros du réel aussi. » Parmi les partenaires, de grosses associations comme la S.P.A. ou France Parrainages, mais aussi des acteurs de taille plus modestes et méconnus du grand public, comme Le Recho ou Activ’Action. Après quelques mois de lancement, ce sont déjà 70 000 téléchargements qui ont permis de récolter près de 2000 €.
- CforGood, la carte de la consommation positive & solidaire
Bien manger et profiter de bons plans : voilà quelques uns des bénéfices de cette appli innovante. Au départ, c’est d’abord un outil de géolocalisation des commerces locaux répondant à des critères d’éco-responsabilité. En bonus : des offres de « bienvenue », des réductions « durables » valables en permanence, ou « flash » pour réduire le gaspillage alimentaire. En échange, le consommateur est invité à faire un don libre à l’association de son choix. « Derrière cette dynamique qui profite à tous – usagers, entreprises, associations et collectivités, se créent des écosystèmes locaux qui développent la résilience des territoires et redonnent un visage plus humain à la ville de demain », s’enthousiasme Allan Floury, le concepteur du projet mis en place en Nouvelle-Aquitaine. Pour aller plus loin dans cette vision d'économie régénérative, l’équipe travaille sur une version décentralisée basée sur la blockchain, qui digitalise les monnaies locales : Poï pour « Proof of Impact ». Une « jauge » indiquera à l’utilisateur l’impact local positif de ses comportements, qui seront récompensés grâce à l’une des premières crypto-monnaies responsables. Testé à Bordeaux, le concept est amené à se développer dans les mois à venir à Paris, Lyon et Nantes, puis dans toutes les régions et à l’international.
Avec ces nouvelles applications, venir en aide aux plus démunis, partager des invendus ou faire des dons aux associations n’a jamais été aussi simple…